SCÈNE PREMIÈRE.
Une chambre dans la maison de Volpone.
ENTRENT VOLPONE ET MOSCA.
VOLPONE:
Bonjour. Et maintenant occupons-nous de notre or. Ouvre l’autel que je puisse voir
mon saint!
(Mosca tire un rideau. On voit des piles d’or, de vaisselles d’argent, des joyaux,
etc.). Salut, mon âme et celle du monde! Je suis plus heureux que la terre féconde voyant
le soleil attendu paraître entre les cornes du Bélier céleste, quand j’examine ta
splendeur qui éteint la sienne. Reposant là, parmi tant d’autres richesses, tu sembles
une flamme dans la nuit, un jour se faisant un chemin dans le chaos tandis que l’obscurité
se réfugie au centre du monde. O toi, fils du soleil, dieu plus étincelant que ton
père, laisse-moi t’embrasser, t’adorer ainsi que toutes les reliques du trésor sacré
enfermé dans cette chambre bénie! Comme les poètes ont eu raison de donner ton nom
glorieux à l’âge où ils auraient voulu vivre! N’es-tu pas la meilleure des choses,
prodiguant plus de joie que les enfants, les parents, les amis, que tous les rêves
éveillés que l’on fait sur terre? Ton éclat, réfléchi dans les yeux de Vénus aurait
dû lui faire enfanter vingt mille Cupidons! Telles sont les beautés et tel est noire
amour! O richesse, sainte muette qui fait parler tous les hommes, tu n’agis pas par
toi-même, mais tu permets de tout accomplir. Tu es le prix des âmes; l’enfer lui-même,
embelli par toi, devient plus enviable que le ciel! Tu représentes la vertu, la renommée,
l’honneur, tout! Qui peut t’obtenir sera noble, vaillant, honnête, sage...
MOSCA:
Et tout ce qu’il voudra, monsieur. La richesse est dans cette vie un plus grand bien
que la sagesse.
VOLPONE:
Voilà une vérité, mon cher Mosca. Et pourtant je suis plus fier des procédés par moi
employés pour acquérir la richesse que de sa possession, car je ne l’ai pas gagnée
comme tout le monde. Je ne fais pas de commerce, ne me fie pas au hasard, ne blesse
pas la terre avec des charrues. Je n’engraisse pas des bestiaux pour achalander les
boucheries; je ne forge pas le fer, n’ai pas de moulins pour moudre l’huile ou le
blé, d’hommes pour les broyer; je ne souffle pas le verre délicat, je n’expose pas
des navires à la fureur des mers qu’ils sillonnent; je ne spécule pas dans les banques,
et je ne pratique pas l’usure.
MOSCA:
Non, monsieur, vous ne dévorez pas les prodigues. Il y en a qui avalent un héritier
confiant, comme un Hollandais ses pilules de beurre, sans être payés pour cela; qui
arrachent de leurs lits de pauvres pères de famille pour les ensevelir vivants dans
quelque prison verrouillée d’où leurs os ne sortiront que lorsque la chair sera pourrie.
Votre nature bienveillante abhorre de semblables moyens. Vous n’aimez pas voir des
larmes de veuves on d’orphelins arroser votre seuil, entendre sous votre toit leurs
cris pitoyables ébranler l’air.
VOLPONE:
Tu as raison, Mosca. Je déteste cela.
MOSCA:
Vous ne ressemblez pas au batteur en grange qui, avec un terrible fléau, surveille
son blé et, mourant de faim, n’osant pas en dérober un grain, préfère se nourrir de
mauves et d’herbes amères; ni au marchand qui, après avoir rempli ses celliers de
généreux vins provenant de la Romagne ou de Candie, boit la lie des vinaigres lombards.
Vous dédaignez de coucher sur la paille, tandis que les mites et les vers se nourriraient
de vos somptueuses tentures et de vos lits moelleux. Vous savez user de vos richesses,
et en distribuer une partie à votre pauvre intendant, à votre nain, à votre hermaphrodite,
a votre eunuque, à tous ceux qui vous entourent et que votre bon plaisir entretient.
VOLPONE:
Lui donnant de l’argent. Voilà pour toi, Mosca. Prends-le de ma main. Tout ce que tu dis est vrai et ce sont
les envieux qui t’appellent parasite. Va me chercher mon nain, mon eunuque, mon fou,
afin qu’ils me divertissent.
(Sort Mosca). Que puis-je faire, sinon choyer mon génie et profiter librement de tous les avantages
que peut me procurer la fortune? Je n’ai ni femme, ni parent, ni enfant, ni alliés
à constituer comme héritiers. Héritera qui je choisirai. C’est pourquoi les gens ont
l’œil sur moi, pourquoi de nouveaux visiteurs affluent journellement dans ma maison,
hommes et femmes de tout âge, m’apportant des présents, m’envoyant de la vaisselle
d’argent, de l’argent monnayé, des bijoux, dans l’espérance, lorsque je mourrai, (ce
qu’ils attendent impatiemment), que je leur retourne dix fois plus qu’ils ne m’auront
donné. D’autres, plus intéressés encore, cherchent à m’accaparer et luttent entre
eux à qui me comblera le plus de cadeaux et me donnera le plus de preuves d’affection.
Je les laisse faire, m’amusant de leurs espérances, en tirant tout le profit possible,
entretenant leurs tendresses. Je les tiens tous dans la main, laissant la cerise effleurer
leurs lèvres, pour la leur retirer aussitôt de la bouche. Eh bien?
(Rentre MOSCA avec NANO, ANDROGYNO et CASTRONE).
NANO:
Maintenant, place pour ces nouveaux joueurs. Ils ne vous apportent ni pièce de théâtre,
ni représentation comme on en donne dans les Universités. Ils vous supplient donc,
quel que soit le récit, de ne point trop éplucher la cadence de leurs vers. Si cela
vous étonne, vous serez plus étonné encore d’apprendre que dans le corps d’Androgyno
est enfermée l’âme de Pythagore, ce jongleur devin, comme vous le verrez par la suite,
laquelle âme vint d’abord d’Apollon, puis fut insufflée dans Aethalides, fils de Mercure,
où elle acquit la faculté de rappeler tout ce qui avait été fait. Elle quitta Aethalides
et alla aussitôt se loger chez Euphorbus aux cheveux d’or, qui fut tué de belle façon
au siège de la vieille Troie par le cocu de Sparte. Elle se réfugia ensuite (je trouve
cela dans ma charte) chez Hermotinus. A peine y était-elle qu’elle demanda asile à
un Pyrrhus de Délos qui lui apprit à pécher. De là nous la retrouvons chez le sophiste
de Grèce. Abandonnant Pythagore en faveur d’un joli morceau, Aspasie la courtisane,
elle passa dans le corps d’une autre catin, pour s’agiter dans un philosophe, Cratès
le cynique, comme elle le raconte. Depuis, des rois, des chevaliers, des mendiants,
des esclaves, des lords, des fous l’ont enfermée; puis des bœufs, des ânes, des chameaux,
des mules, des boucs, des blaireaux, où elle s’est complue à parler comme le coq du
savetier. Mais je no suis pas venu pour discourir sur cette matière, sur son un, deux,
trois, son grand serment par quatre, sa musique, son trigone, sa cuisse d’or, son
discours sur la rotation des éléments, mais pour te demander comment tu as supporté
ta dernière transformation et si tu as changé de vêtement dans ces jours de réformation?
ANDROGYNO:
Je me suis habillé en réformé, autant dire en fou, ainsi que vous le voyez, considérant
toutes les vieilles doctrines comme des hérésies.
NANO:
N’as-tu jamais risqué des mets défendus par ton maître?
ANDROGYNO:
J'ai d’abord mangé du poisson quand je suis entré chez les Chartreux.
NANO:
Pourquoi alors as-tu renoncé à ton silence dogmatique?
ANDROGYNO:
Un avocat turbulent l’a voulu.
NANO:
O changement qui stupéfie! Quand le sieur avocat t’at-il chassé? Pour l’amour de Pythagore,
quel corps as-tu alors habité?
ANDROGYNO:
Celui d’une bonne mule.
NANO:
De la façon tu pouvais manger des fèves?
NANO:
De la mule, où as-tu passé?
ANDROGYNO:
Dans une bête tout à fait étrange, quelques écrivains l’appellent un âne; d'autres
un frère précis, pur, illuminé, de ceux qui mangent de la viande et quelquefois se
dévorent entre eux; de ceux qui publient des libelles, colportent des mensonges sanctifiés
entre chaque cuillerée de pâté de la Nativité.
NANO:
Maintenant, par le ciel, assez de cette notion profane et parlons de la transmigration
qui suivit.
ANDROGYNO:
J’habitai le corps où je suis encore.
NANO:
Un corps de délices, valant mieux que celui d’antan, le corps d’un hermaphrodite!
Maintenant, dis-moi, chère âme, parmi tous ces changements quel corps choisirais-tu
s’il fallait t’y fixer?
ANDROGYNO:
Celui que j’habite. Je vaudrais même n’en plus changer.
NANO:
Parce que tu peux jouir à la fois du plaisir de chaque sexe.
ANDROGYNO:
Hélas! Ces plaisirs sont vieillis et abandonnés! Je me félicite d'être l’âme d’un
fou, la seule créature que je puisse qualifier de bénie, car les autres formes ne
m’ont pas porté bonheur.
NANO:
Parle franchement, comme si tu habitais toujours le corps de Pythagore. Nous célébrerons
cette savante opinion, camarade eunuque, comme il nous convient, avec tout notre esprit
et tout notre talent, pour dignifier des membres spéciaux de la fraternité.
VOLPONE:
Hé bien! hé bien! Mosca, cela est-il de ton invention?
MOSCA:
Oui, s’il plaît à mon patron.
VOLPONE:
Cela me plaît, mon bon Mosca.
MOSCA:
En ce cas, j’en suis bien l’auteur.
NANO ET CASTRONE:
chantant.
Les fous sont la seule nation
Digne de l’envie et de l’admiration des hommes.
Libres de tout souci, de tout chagrin,
Ils sont heureux et rendent heureux les autres.
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Tout ce qu’ils disent est d’or.
Le fou est le préféré de nos grands hommes,
L’amusement et le plaisir de nos dames.
Une langue et une marotte sont ses trésors.
Sa figure provoque la gaîté
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Et il peut s’exprimer franchement sans qu’on l’en blâme.
C’est la grace de toute fête,
C’en est quelquefois le principal convive.
Il a son couteau et son tabouret
Quand il a de l’esprit.
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Oh! qui no voudrait être fou?
Lui, lui, luit!
(On frappe au dehors).
VOLPONE:
Qu’est cela? Sauvez-vous!
(Sortent Nano et Castrone). Va voir, Mosca. Fou, retire-toi.
(Sort Androgyno).
MOSCA:
C’est le signor Voltore, l’avocat. Je le reconnais à sa façon de frapper.
VOLPONE:
Va me chercher ma robe, mes fourrures et mon bonnet de nuit. Dis-lui que je me lève
et laisse-le se morfondre un peu dans la galerie.
(Sort Mosca). Mes clients commencent leurs visites. Va tours, milans, corbeaux, corneilles, tous
les oiseaux de proie qui espèrent me réduire à l’état de carcasse, s’abattent sur
ma demeure. Je ne suis pas encore pour eux.
(Rentre MOSCA, portant la robe, etc.). Quelle nouvelle?
MOSCA:
Une pièce d’argenterie, monsieur.
MOSCA:
Enorme, massive, ancienne, avec votre nom inscrit et vos armes gravées.
VOLPONE:
Dieu! Il aurait dû faire graver aussi un renard s’étirant avec une apparence trompeuse
et se moquant d’un corbeau à la bouche ouverte!
MOSCA:
La plaisanterie est subtile, monsieur.
VOLPONE:
Donne-moi ma fourrure.
(Il met sa robe de malade). Pourquoi ris-tu?
MOSCA:
Je ne puis m’en empêcher, monsieur, en songeant à ce qu’il doit penser en marchant
de long en large. Il se demande si ce n’est pas le dernier cadeau à l’aide duquel
il cherchera à vous séduire. Si vous mouriez aujourd’hui après lui avoir tout laissé,
qu’adviendrait-il de lui demain? Comme il se sentirait récompensé de toutes ses avances;
comme il deviendrait digne et honoré! Il caracolerait avec ses fourrures et ses housses
de pied, escorté d’un troupeau de fous et de clients; on s’écarterait devant sa mule
aussi lettrée que lui-même. On l’appellerait le grand avocat, d’où il tirerait cette
conclusion qu’il n’y a rien d’impossible.
VOLPONE:
L’impossible c’est qu’il soit savant.
MOSCA:
Bah! II serait riche et c’est le principal. Couvrez un âne d’une pourpre imposante;
il vous suffira de dissimuler les deux oreilles ambitieuses et le voilà passé docteur
de cathédrale!
VOLPONE:
Mon bonnet, mon bonnet, Mosca. Introduis notre homme.
MOSCA:
Attendez, monsieur; votre onguent pour les yeux.
VOLPONE:
Tu as raison, dépêche-toi! Il me tarde d’entrer en possession de mon nouveau présent.
MOSCA:
J’espère que vous en recevrez beaucoup encore...
VOLPONE:
Merci, mon bon Mosca.
MOSCA:
Quand je serai poussière et qu’une centaine d’autres m’auront succédé.
VOLPONE:
Tu exagères, Mosca.
MOSCA:
Vous vivrez assez longtemps pour abuser ces harpies.
VOLPONE:
Mon cher Mosca! Bien. Mon oreiller. Tu peux le faire entrer.
(Sort Mosca). Maintenant feignons la toux, la phtisie, la goutte, l’apoplexie, la paralysie et le
catarrhe. Venez à mon secours, vous qui, depuis trois ans, entretenez leur espérance!
Le voici! Je l’entends!
(Toussant). Hum! Hum! Oh!
(Rentre MOSCA, introduisant VOLTORE, qui tient un plat d’argent).
MOSCA:
Vous n’avez pas avancé d’un pas, monsieur. Seulement il vous aime plus que les autres,
et vous manœuvrez comme un homme sage en l’entretenant dans ce sentiment par des visites
matinales, des preuves d’affection, lesquelles, je le sais, ne peuvent qu’augmenter
sa gratitude. Monsieur! Patron! C’est le signor Voltore.
VOLPONE:
faiblement. Qu’est-ce que vous dites?
MOSCA:
Le signor Voltore vient ce matin vous rendre visite.
VOLPONE:
Je l’en remercie.
MOSCA:
Il vous apporte un plat ancien, acheté à Saint-Marc et qu’il vous prie d’accepter.
VOLPONE:
Il est le bienvenu. Dis-lui de venir plus souvent.
MOSCA:
Il vous remercie et désire que vous veniez plus souvent.
VOLPONE:
Dis-lui d’approcher. Où est-il? II me tarde de lui serrer la main.
MOSCA:
Le plat est là, monsieur.
VOLTORE:
Comment ça va-t-il?
VOLPONE:
Je vous remercie, signor Voltore. Où est le plat? J’ai les yeux bien malades.
VOLTORE:
Lui mettant le plat entre les mains. Je suis désolé de vous trouver encore aussi faible!
MOSCA:
à part: C’est-à-dire qu’il ne le soit pas davantage.
VOLPONE:
Vous êtes trop généreux.
VOLTORE:
Non, monsieur. Plût au ciel que je pusse vous donner la santé comme je vous donne
ce plat!
VOLPONE:
Vous donnez ce que vous pouvez. Je vous remercie. Je ne demeurerai pas un ingrat devant
une telle preuve d’amitié. Je vous en prie, venez souvent me voir.
VOLTORE:
Je vous le promets.
VOLPONE:
Ne vous tenez pas si éloigné de moi.
MOSCA:
Entendez-vous, monsieur?
VOLPONE:
Ecoutez-moi encore. Il s’agit de vous.
MOSCA:
Vous êtes un homme heureux, monsieur. Appréciez votre chance.
VOLPONE:
Je ne peux plus maintenant vivre longtemps...
MOSCA:
Vous êtes son héritier, monsieur.
VOLPONE:
Je sens que je m’en vais! Oh! oh! oh! oh! Je fais voile vers le port! Oh! oh! oh!
oh! Et je me réjouirai d’y toucher.
MOSCA:
Hélas! mon bon monsieur! Tous nous devons partir...
MOSCA:
L’âge est notre maître...
VOLTORE:
Je t’en prie, écoute-moi. Tu es sûr que je suis son héritier?
MOSCA:
Si vous l’êtes? Je vous en prie, monsieur, inscrivez-moi parmi les gens qui vous servent!
Toutes mes espérances dépendent de votre honneur! Je suis perdu si le soleil levant
ne brille pas sur moi!
VOLTORE:
Il brillera, Mosca, et te réchauffera de ses rayons.
MOSCA:
Monsieur, je suis un homme qui n’a encore rien fait pour gagner votre reconnaissance.
Je porte vos clefs, je sais ou sont vos cassettes et vos coffres fermés, je tiens
l’inventaire de vos bijoux, de votre argenterie, de votre argent, je suis votre intendant
et je surveille vos biens.
VOLTORE:
Mais suis-je le seul héritier?
MOSCA:
Sans un concurrent, monsieur. Il le confirmait ce matin. La cire est encore chaude
et, sur le parchemin, c’est à peine si l’encre a eu le temps de sécher.
VOLTORE:
Quel bonheur pour moi! Mais, mon cher Mosca, quel hasard me vaut cela?
MOSCA:
D’abord votre mérite. J’ignore la seconde raison.
VOLTORE:
C’est ta modestie qui t’empêche de la connaître. Elle aura sa récompense.
MOSCA:
Il a toujours aimé vos façons, monsieur. Quand je suis entré à son service, je l’ai
souvent entendu exprimer son admiration pour les hommes de votre belle profession,
capables de défendre, jusqu’à l’enrouement, toutes les causes, fussent-elles les plus
contraires, et par simple amour de la justice; les hommes qui, comme vous, avec une
étonnante souplesse, vont et viennent, font et défont, donnent des conseils à deux
fins, acceptent l’or qui les tente et l’empochent. Pour sa part, il s’estimerait béni
du ciel s’il pouvait faire son héritier un de ces esprits patients, sages, graves,
possédant une langue à la fois si embrouillée et si bruyante, qui ne risquent pas
un mot, pas même un mensonge, sans honoraires, et pour qui chaque-parole tombée représente
un sequin.
(On frappe au dehors). Qui est là? On frappe! Il ne voudrait pas que l’on vous vît, monsieur... Vous pouvez
pourtant être venu en passant, à la hâte... Oh, monsieur, quand vous nagerez dans
ce lard de l’or, quand vous aurez du miel par-dessus les épaules, lorsque votre menton
se haussera pour en éviter le flot, pensez à votre vassal et soûvenez-vous de moi.
Je n’aurai pas été le moins bon de vos clients.
MOSCA:
Voulez-vous parcourir l’inventaire? voir une copie du testament? Avant peu, je vous
les apporterai. Maintenant, partez et prenez l’attitude d’un homme affairé.
(Sort Voltore).
VOLPONE:
se levant. Excellent Mosca! Viens que je t’embrasse!
MOSCA:
Reprenez votre position, monsieur, voici venir Corbaccio.
VOLPONE:
Cache le plat. Après le vautour, le corbeau!
MOSCA:
Reprenez votre silence et continuez de dormir. tes le bienvenu.
(Mettant le plat avec les autres richesses). Demeure et multiplie! Maintenant nous allons voir un homme plus malade que celui qui
feint de l’être et qui pourtant espère gambader sur son tombeau...
(Entre CORBACCIO). Signor Corbaccio, vous êtes le bienvenu.
CORBACCIO:
Comment va le patron?
MOSCA:
Comme hier. Il n’y a pas de mieux.
CORBACCIO:
Qui est un peu sourd: Il va mieux?
MOSCA:
Oh! non, monsieur! Plutôt plus mal.
CORBACCIO:
Bien. Où est-il?
MOSCA:
Sur son lit, il vient de s’endormir.
MOSCA:
Non, monsieur, ni cette nuit, ni hier. Il sommeille à peine.
CORBACCIO:
Bon. Il devrait consulter des médecins. Je lui apporte une potion opiacée de la part
de mon docteur.
MOSCA:
II ne veut pas entendre parler de drogues.
CORBACCIO:
Pourquoi? Celle-ci a été faite devant moi, je sais de quoi elle se compose, et qu’elle
ne peut qu’apporter une amélioration. Sur ma vie, ce n’est que pour lui procurer un
peu de sommeil.
VOLPONE:
à part: Oui, le dernier sommeil, si je la prenais!
MOSCA:
Monsieur, il n’a pas confiance en la médecine.
MOSCA:
Il n’a pas confiance en la médecine. Il estime que la plupart de vos docteurs sont
un danger plus grave que la maladie. Je l’ai souvent entendu répéter qu’un médecin
ne serait jamais son héritier.
CORBACCIO:
Je ne serai jamais son héritier?
MOSCA:
Je parle de votre médecin, monsieur.
CORBACCIO:
Je n’ai jamais fait allusion à lui.
MOSCA:
Il ne peut pas digérer leurs médecines. Il dit qu’ils écorchent un homme avant de
l’avoir tué.
CORBACCIO:
Bien. Je comprends.
MOSCA:
Et qu’ils agissent ainsi, sachant très bien ce qu’ils font, car non seulement la loi
les absout, mais les récompense. Or il lui répugnerait de vendre sa vie.
CORBACCIO:
En effet, Ils ont pour vous expédier autant de licences qu’un juge.
MOSCA:
Plus! Le juge no tue que lorsque la loi condamne, tandis que le médecin peut tuer
le juge.
CORBACCIO:
Le juge, moi, tout le monde. Comment va son apoplexie? S’en ressent-il encore?
MOSCA:
Plus violemment que jamais. Sa parole est saccadée, son regard fixe, sa figure s’allonge
de plus en plus.
MOSCA:
Sa bouche est toujours béante et ses paupières tombent.
MOSCA:
Un engourdissement glacial raidit ses membres et rend sa chair couleur de plomb.
MOSCA:
Son pouls bat lentement.
CORBACCIO:
Bons symptômes.
MOSCA:
Et de sa cervelle...
N
X
Nota del editor digitalLes deux interventions suivantes du text original original (CORBACCIO Ha? How? not
from his brain? / MOSCA Yes, sir, and from his brain–) ne sont pas présentes dans
la traduction de Duval (1920, p. 16).
CORBACCIO:
Je vous entends. Bon.
MOSCA:
Coule une sueur froide, avec un autre écoulement continuel qui part du coin des yeux.
CORBACCIO:
C’est possible. Je me sens mieux! Et ses vertiges?
MOSCA:
Il a perdu tout sentiment, et ne ronfle même plus. C’est à peine si vous vous apercevriez
qu’il respire.
CORBACCIO:
Parfait! parfait! Je vivrai sûrement plus longtemps que lui. Cela me rajeunit d’une
vingtaine d’années!
MOSCA:
Je m’apprêtais à aller chez vous, monsieur.
CORBACCIO:
Il a fait son testament? Qu’est-ce qu’il me laisse?
CORBACCIO:
Il ne me laisse rien?
MOSCA:
Je crois qu’il n’a pas rédigé son testament.
CORBACCIO:
Oh! oh! oh! qu’est-ce que faisait ici Voltore, l’avocat?
MOSCA:
Il flairait une carcasse et quand il a entendu dire que mon maître s’apprêtait à écrire
son testament ainsi que je l’en pressais pour votre bien...
CORBACCIO:
Il est venu, n’est-ce pas? Je m’en doutais.
MOSCA:
Et il lui a présenté ce plat d’argent.
CORBACCIO:
Pour devenir son héritier.
MOSCA:
Je ne sais pas, monsieur.
CORBACCIO:
Moi, je le sais!
MOSCA:
à part: Il le mesure à sa longueur!
CORBACCIO:
Très bien. Je saurai l’en empêcher! Regarde, Mosca, j’ai apporté un sac de brillants
sequins, qui pèse plus que son plat.
MOSCA:
prenant le sac: En effet, monsieur, voilà de la vraie médecine; un médicament secret! Ne parlez plus
de remèdes opaciés. Voilà le grand élixir!
CORBACCIO:
De l’or palpable s’il n’est pas potable.
MOSCA:
Je lui en administrerai dans son bol.
MOSCA:
Cordial cent fois béni! Ça va le rétablir.
MOSCA:
Ce ne serait peut-être pas une bonne chose.
MOSCA:
De lui rendre la santé.
MOSCA:
Cela pourrait lui faire un curieux effet seulement de le sentir.
CORBACCIO:
Dans ces conditions rends-moi le sac.
MOSCA:
A bas les mains! Excusez-moi. Vous ne nous causerez pas ce tort. Je peux vous l’avouer,
vous aurez tout.
MOSCA:
Tout, monsieur, c’est votre droit, votre bien. Personne ne pourra en réclamer une
part. Tout est à vous, sans compétition, la destinée l’a voulu ainsi.
CORBACCIO:
Explique-toi, mon bon Mosca.
MOSCA:
Voilà. A un certain moment l’accès passera.
MOSCA:
Profitant du mieux, je lui parlerai à nouveau de la nécessité de faire son testament
et je lui montrerai votre sac.
MOSCA:
Ce serait plus parfait encore si vous consentiez à m’écouter.
CORBACCIO:
De tout mon cœur.
MOSCA:
Maintenant, si j’ai un conseil à vous donner, rentrez vite chez vous, et libellez
un testament où vous inscrirez mon maître comme votre unique héritier.
CORBACCIO:
Ce serait déshériter mon fils!
MOSCA:
Tant mieux! La couleur tournera à votre profit.
MOSCA:
Je veux dire que sous couleur de le faire votre héritier vous rédigerez en sa faveur
un testament que vous m’enverrez. Je vanterai, en les exagérant, vos soins, vos veilles,
vos prières, vos cadeaux, votre présent d’aujourd’hui. Ensuite je lui montrerai votre
testament où, sans hésitation, sans s’occuper de votre propre fils, si brave, d’un
si haut mérite, cédant malgré vous au torrent de l’affection qui vous porte vers mon
maître, vous le constituez votre héritier. Il ne peut être assez stupide, assez borné,
assez peu consciencieux, assez ingrat...
CORBACCIO:
Pour ne pas me faire son héritier à son tour?
CORBACCIO:
J’avais déjà pensé à ce petit complot.
CORBACCIO:
Tu ne le crois pas?
CORBACCIO:
C’est exactement ce que j’avais l’intention de faire.
MOSCA:
Et quand vous l’aurez fait...
CORBACCIO:
Quand il m’aura reconnu pour son héritier...
MOSCA:
Certain que vous êtes de lui survivre...
MOSCA:
Puisque vous êtes vigoureux...
CORBACCIO:
Tu peux le dire.
CORBACCIO:
J’avais pensé à cela aussi. Tu es le véritable interprète de mes intentions.
MOSCA:
Non seulement vous vous faites du bien à vous-même...
CORBACCIO:
Mais encore à mon fils.
CORBACCIO:
Encore une invention de moi.
MOSCA:
Hélas, monsieur, le ciel sait que j’ai prêté toute mon attention, donné tous mes soins
(mes cheveux en ont grisonné) pour amener la chose à ce point.
CORBACCIO:
J’en suis sûr.
MOSCA:
C’est pour vous que je travaille ici.
CORBACCIO:
Oui, travaille encore.
(Faisant mine de sortir). Je vais arranger tout cela.
CORBACCIO:
Je te sais honnête...
MOSCA:
à part: Son intelligence n’est pas meilleure que ses oreilles.
CORBACCIO:
Sans aucun doute je serai un père pour toi.
MOSCA:
à part: Et moi je duperai le père qui m’échoit.
CORBACCIO:
Il se peut que la jeunesse me revienne. Pourquoi pas?
MOSCA:
à part: Sa Seigneurie est un âne précieux.
MOSCA:
Je dis qu’il faut que Votre Seigneurie se hâte.
CORBACCIO:
Tu as raison. Je pars.
(Il sort).
VOLPONE:
se levant: Je vais éclater! Oh, mes côtes! mes côtes!
MOSCA:
Contenez ce flux de rires. Cette espérance, vous le savez, est une amorce qui dissimule
un hameçon.
VOLPONE:
Mais avec quelle habileté tu l’auras accroche! Je n’en puis plus! Bonne canaille,
laisse-moi t’embrasser. Je ne t’ai jamais vu dans d’aussi bonnes dispositions.
MOSCA:
Hélas, monsieur, je fais comme on m’a appris; je suis vos graves instructions; je
les paie en bonnes paroles, je leur graisse les oreilles avec de l’huile et je les
congédie.
VOLPONE:
C'est vrai!... Quelle punition porte l’avarice en elle-même!
MOSCA:
J’y suis bien pour quelque chose.
VOLPONE:
Les soucis, les maladies, la crainte, qui font cortège à la vieillesse, la mort si
souvent appelée, sont leur partage. Leurs membres deviennent faibles; leurs sens s’émoussent;
la vue, l’ouïe, le mouvement sont morts avant eux; leurs dents, ces instruments avec
lesquels on mange, tombent, et ils comptent sur la vie! En voilà un qui retourne chez
lui, et désire prolonger ses jours! Il ne sent plus sa goutte, ni sa paralysie. Il
rajeunit do vingt ans, il s’illusionne sur son âge auquel il oppose un démenti. Ainsi
qu’Aeson, il espère, à l’aide de charmes, retrouver la jeunesse, et il s’engraisse
de ces espérances comme si le docteur pouvait être aussi facilement dupé que lui.
Et autant en emporte le vent!
(On frappe à nouveau). Qui vient encore? Un troisième?
MOSCA:
Recouchez-vous! Je reconnais sa voix. C’est Corvino, notre gai marchand.
VOLPONE:
se recouchant: Je suis mort.
MOSCA:
Encore une petite dose sur vos yeux.
(Il les frotte avec la pommade). Qui est là?
(Entre CORVINO). Signor Corvino! On vous attendait avec impatience. Comme vous seriez heureux, si vous
saviez...
MOSCA:
La dernière heure est venue, monsieur!
CORVINO:
Il n’est pas mort?
MOSCA:
Non, mais il n’en vaut guère mieux! Il ne reconnaît plus personne.
CORVINO:
Que dois-je faire alors?
MOSCA:
Pourquoi cette question?
CORVINO:
Je lui apportais une perle.
MOSCA:
Peut-être lui reste-t-il assez de mémoire pour vous reconnaître. Il vous appelle encore.
Votre nom est le seul qu’il prononce. La perle est belle?
CORVINO:
Venise n’en a jamais possédé une pareille.
VOLPONE:
faiblement: Signor Corvino...
MOSCA:
Il vous réclame. Donnez-la lui. Il est ici, monsieur. II vous apporte une riche perle.
CORVINO:
Comment ça va-il? Dites-lui qu’elle pèse douze carats.
MOSCA:
Monsieur, il ne peut pas entendre, il est sourd. Cela semble pourtant lui faire du
bien de vous voir.
CORVINO:
Dites-lui que j’ai un diamant à son intention.
MOSCA:
Il faudrait mieux le lui montrer. Mettez-le dans sa main. Il a encore sa connaissance.
Regardez comme il s’en empare.
CORVINO:
Hélas! mon bon monsieur! Quel spectacle pitoyable!
MOSCA:
N’y pensez pas. Les larmes d’un héritier sont des rires sous un masque.
CORVINO:
Je suis son héritier?
MOSCA:
Je ne peux pas voir son testament avant qu’il soit mort. Nous avons eu ici Corbaccio,
Voltore, et tant d autres, trop nombreux pour que je les aie comptés, impatients d’hériter.
Moi, profitant de ce qu’il vous appelait, j’ai pris du papier, une plume, de l’encre,
et je lui ai demandé qui il choisissait comme héritier : «Corvino», m’a-t-il dit;
qui serait son exécuteur : «Corvino», m’a-t-il dit encore. Et s’il ne répondait pas
à une de mes questions, je comprenais aux signes qu’il me faisait de la tête, malgré
sa faiblesse, que c’était bien vous qu’il consentait à choisir. Alors j’ai renvoyé
chez eux les autres sans rien leur léguer, sauf des malédictions.
CORVINO:
l’embrassant: Ah! mon cher Mosca! Il ne nous voit pas?
MOSCA:
Pas plus qu’un ménestrel aveugle. II ne reconnaît personne, pas même la figure d’un
ami. Il ne se souvient même plus du nom du serviteur qui lui a apporté son dernier
repas, versé sa dernière tisane. Pas même de ceux qu’il a engendrés et élevés.
CORVINO:
A-t-il des enfants?
MOSCA:
Des bâtards, une douzaine au plus, qu’il a eus avec des mendiantes, des Egyptiennes,
des Suisses, des négresses, quand il était ivre. Vous ne le saviez pas? C’est la fable
commune; le nain, le fou, l’eunuque, tout ça c’est sa progéniture. Il est le père
de tout son entourage, sauf six, mais il ne leur laisse rien.
CORVINO:
Bien! très bien! Tu es sûr qu’il ne peut pas entendre?
MOSCA:
Absolument sûr. Regardez, jugez par vous-même. lpone). Puissiez-vous fermer une bonne
fois vos yeux ignobles, qui pleurent de la vase comme deux citernes à Grenouilles!
Nous cacher le spectacle de ces joues penantes, couvertes de cuir au lieu de peau...
(Criant à l’oreille de Volpone) Que la vérole vienne et s’ajoute à toutes vos maladies, si elle doit vous expédier
plus tôt oour vos incontinences, car elles l’auront mérité, monsieur, et que la peste
s’en méle!
(A Corvino). Venez à mon secours, monsieur.
(A Volpone) ... et qui ressemblent à des vieux torchons de cuisine gelés.
CORVINO:
riant: Ou à un vieux mur enfermé sur lequel la pluie en tombant a laissé des traces.
MOSCA:
Parfait! Vous pouvez crier encore plus fort. C’est à peine s’il entendrait une coulevrine
qu’on déchargerait à son oreille.
CORVINO:
Son nez est comme un égout.
MOSCA:
Bien dit! Et la bouche?
MOSCA:
Laissez-moi faire. Je pourrais l’étouffer avec un oreiller aussi facilement que si
j’étais sa garde.
CORVINO:
Faites comme il vous plaira, mais je m’en vais.
MOSCA:
Allez-vous-en, car je crains que votre présence ne prolonge ses derniers instants.
CORVINO:
N’usez pas de violence.
MOSCA:
Pourquoi? Qu’est qui vous rend aussi scrupuleux?
CORVINO:
Faites ce que vous voudrez.
CORVINO:
Vous croyez que je peux sans inconvénient reprendre ma perle?
MOSCA:
Et le diamant? De quoi allez-vous vous inquiéter? Ici tout ne vous appartient-il pas?
Ne suis-je pas là, moi dont vous avez fait votre créature, et qui vous devrai l’existence?
CORVINO:
Cher Mosca! Tu es mon ami, mon compagnon, et tu auras ta part dans toutes mes bonnes
fortunes.
MOSCA:
Votre femme, monsieur.
(Sort Corvino). Il n’y a pas d’autres moyens de le faire sortir!
VOLPONE:
Mosca, tu es divin! Aujourd’hui lu t’es surpassé!
(On frappe au dehors). Qui est là? Je ne veux plus être importuné. Prépare-moi des musiciens, des danses,
des banquets, tous les plaisirs! Le Turc n’est pas plus sensuel dans les plaisirs
que veut l’être Volpone.
(Sort Mosca) Voyons. Une perle! Un diamant! De l’argenterie! Des sequins! La matinée aura été profitable.
Cela vaut mieux que voler dans des églises ou, par gloutonnerie, de s’engraisser tous
les mois d’un homme!
(Rentre MOSCA). Qu’est-ce qu’il y a?
MOSCA:
La belle lady Would-be, l’épouse du chevalier anglais, Sir Politick Would-be (c’est
de la façon qu’on m’a dit d’annoncer) envoie demander comment vous avez passé la nuit
et si l’on peut vous voir.
VOLPONE:
Pas maintenant. Dans trois heures... lorsque je serai gris de joie et de vin. Par
le ciel, je m’étonne de la confiance absolue de ces téméraires Anglais qui ne craignent
pas d’exposer leurs femmes à toutes les rencontres.
MOSCA:
Le chevalier ne s’appelle pas pour rien Politick. Il sait que si sa femme affecte
des airs étranges, elle n’a pas la physionomie d’une malhonnête personne. Oh! s’il
s’agissait de l’épouse de Corvino...
VOLPONE:
Elle est si jolie que cela?
MOSCA:
C'est l’étoile étincelante de l’Italie! Une donzelle toute jeune! Une beauté mûre
pour la moisson, dont la peau est plus blanche que le cygne, l'argent, la neige, le
lis! dont les douces lèvres appellent une éternité de baisers! dont la chair aussitôt
effleurée se colore en rouge! Elle brille comme votre or, et comme votre or elle est
belle!
VOLPONE:
Pourquoi ne l’ai-je pas encore aperçue?
MOSCA:
Hélas! monsieur, je ne l’ai découverte qu’hier.
VOLPONE:
Pourrais-je la voir?
MOSCA:
Impossible! Elle est surveillée aussi étroitement que votre or; jamais elle ne sort,
jamais elle ne prend l’air, sauf par la fenêtre. Ses regards sont doux comme les premiers
raisins ou les premières cerises, et surveillés d’aussi près.
VOLPONE:
Il faut que je la voie.
MOSCA:
Une garde composée de la maisonnée et qui représente une dizaine d’espions ne la quitte
pas des yeux, et chaque espion est celui de son voisin, de telle sorte que pas un
ne peut faire un mouvement qui échappe à l’autre.
VOLPONE:
Je veux la voir, quand ça ne serait qu’à la fenêtre.
VOLPONE:
Ce sera plus sûr. Nous y réfléchirons.